FICTION PLANE:
trois pilotes dans l'avion

Vous étiez tous les deux dans le grunge quand vous vous êtes connus ? Vous écoutiez quels groupes ?

Joe Sumner : C'était juste à la fin du grunge. On se dirigeait soit vers plus lourd, le metal, soit vers plus léger, l'indé américaine. J'étais coincé entre les deux. Il y avait déjà Pavement. Ensuite, Weezer a suivi Pavement. J'ai détesté Weezer parce qu'ils ont piqué l'idée que j'avais eue. Mais il y avait aussi Machinehead et d'autres.

Pete Wilhoit : Sinkhole.

Même chose pour toi ?

Seton Daunt : Ouais, j'étais fan de Nirvana et Rage Against The Machine. J'avais 15-16 ans à l'époque. On s'est rencontrés trois ou quatre ans plus tard. A Londres, c'était pas cool du tout d'aimer le rock. C'était bizarre. Les Foo Fighters sont venus à Londres jouer dans un petit club. Il y avait cent ou deux cents personnes, que des fans hardcore. C'était quasi ringard mais je trouvais ça génial. Six ans plus tard, tu allais voir les Foo Fighters et tu étais super branché. Comme quoi, ça tourne. J'ai toujours adoré Rage Against The Machine. C'était aussi le début de Queens of the Stone Age, un bon groupe.

Et Bob Dylan ?

Seton Daunt : Bob Dylan, forcément, oui. Leonard Cohen, Nina Simone, etc. J'adore toute cette musique acoustique. On jouait pas mal de musique en famille, un peu comme autour d'un feu de camp. Entre ça et le rock…

En dehors de la musique, vous étiez attirés par les autres aspects du grunge ? Les fringues, le look ?

Seton Daunt : Ouais, pas besoin de se laver.

Joe Sumner : Jamais de douche, ni de bains. Pas de maquillage. Plus t'avais de boutons, mieux c'était.

Ça plaisait aux filles ?

Joe Sumner : Non, c'est pour ça qu'on est passé au smooth jazz.

C'était comment, un concert de Nirvana ? Vous les avez vus ?

Seton Daunt : Malheureusement non, je les ai ratés.

Joe Sumner : Moi si !

Pete Wilhoit : Pourvu qu'ils se reforment.

Quel effet ça t'a fait de les voir pour la première fois ?

Joe Sumner : A l'époque, [Kurt Cobain] était une espèce de messie. Le seul fait de les voir là, c'était incroyable. Tout ce qu'ils faisaient était hallucinant. Même quand ils se plantaient dans les accords ou qu'ils chantaient faux, c'était dingue. Mais la dernière fois, c'était franchement mieux, avec le guitariste en plus. C'était un vrai groupe. Ensuite, il est mort. Gros bêta.

Tu les as vus combien de fois ?

Joe Sumner : Quatre fois. Quand je les ai vus à New York, il portait un pull à rayures rouges et noires. Et tout le monde s'est mis à porter le même. C'était de la folie.

Quel est le meilleur concert que tu aies vu ?

Joe Sumner : De Nirvana ? Le meilleur, c'était le dernier, au Wallace Civic Center de Fitchburg dans le Massachusetts. C'était dans une patinoire qu'ils avaient recouverte.

Pete Wilhoit : Ils auraient dû le faire sur la glace.

Vous vous souvenez de ce que vous faisiez le jour ou Cobain est mort ?

Seton Daunt : J'étais en cours.

Joe Sumner : C'est un de mes profs qui l'a annoncé.

Seton Daunt : Un jour sombre.

Ça a été un choc ?

Joe Sumner : Un peu, mais ça devait arriver. On s'y attendait tous. N'empêche, ça a été un choc.

C'est dommage, vous n'avez pas eu le temps de…

Seton Daunt : C'est clair.

Joe Sumner : Pareil pour Jeff Buckley. On m'avait proposé de le rencontrer. Je trouvais qu'il avait l'air d'un branleur sur les photos, donc j'ai refusé. Les filles étaient folles de lui.

Seton Daunt : Souvent, les gens n'aimaient pas à la première écoute et à un moment, c'était le coup de foudre. Jeff Buckley avait cet effet étrange sur les gens.

Vous aimiez les Beatles étant gamins ?

Seton Daunt : Je les ai aimés en grandissant. Je ne les supportais pas avant.

Joe Sumner : Moi, je ne les aime toujours pas.

Aucune chanson des Beatles ne vous parle plus que les autres ?

Joe Sumner : Certaines ne sont pas mal, mais en général ils m'énervent. Désolé pour tous.

Même John Lennon en solo ?

Joe Sumner : Surtout Lennon en solo. Il est nul.

Pete Wilhoit : Les Beatles, c'est le premier groupe sur lequel j'ai essayé de jouer. C'était simple, je pouvais comprendre. Avec un copain qui faisait de la batterie et moi au piano, on s'est mis à composer notre propre musique comme ça. En ce sens, les Beatles ont été importants. Ils m'ont appris la recette d'une bonne chanson : simple et accrocheuse.

La légende dit que Ringo n'a pas participé au dernier album.

Pete Wilhoit : Non, c'était Bernard Purdie d'après les interviews que j'ai pu lire de lui.

Joe Sumner : C'est vrai alors ?

Pete Wilhoit : Aucune idée.

Joe Sumner : Les Beatles auraient employé les services du faiseur de tubes.

Pete Wilhoit : Je sais pas. En tout cas, c'est un type marrant.

Joe Sumner : Marrant comme… ?

Pete Wilhoit : Un taré égocentrique.