Il n'a jamais été aussi prolifique mais quantité ne rime généralement pas avec qualité... sauf lorsqu'on est un vieux marin du rock, une légende vivante nommée Bruce Springsteen, que ni les modes, ni les tempêtes ne sont jamais parvenues à faire chavirer. Le nouvel album du "Boss", tout en proposant un son pur jus identifiable instantanément, réussit l'exploit de conforter encore davantage une étoile (de shériff !) au firmament de la galaxie rock. En concert unique en France le 19 juillet 2009, sur la scène du Festival des Vieilles Charrues.

- ruée vers l'or -

Working On The Dream, 16e album du Boss est la nouvelle bombe d'un vieux de la vieille. Classé N°1 au Billboard (Top Albums américain), il assoit un peu plus la légende d'un (bientôt) sexagénaire plus en forme que jamais. Dans cette course au sommet, Bruce Springsteen est désormais, à égalité avec les Rolling Stones, le troisième artiste le plus populaire de tous les temps aux Etats-Unis, avec 9 albums tout en haut des ventes durant sa carrière. Seuls les Beatles (19), Elvis Presley et Jay-Z (10!) on fait mieux.

Comme au bon vieux temps des pionniers de l'Ouest américain, Springsteen convie son auditoire à une véritable rédécouverte de l'Amérique des racines, celle des grands espaces et de la vie rude et sauvage. Pour sûr, John ford et John Wayne n'auraient pas reniés 'Outlaw Pete', cavalcade effrénée qui ouvre l'album. S'il vous prend l'envie de jouer les chercheurs d'or pour coller à l'ambiance, vous ne serez pas déçus car le dernier Springsteen recèle de belles pépites d'or pur : 'Working On A Dream', avec ses chœurs façon "sixties". 'Queen Of The Supermarket', somptueux titre où Bruce, en crooner irresistible est accompagné de choeurs que n'auraient pas reniés les Beatles, 'This Life', envoutant comme une mélopée de feu Roy Orbison, 'Good Eye', un Blues criard, aboyé par un cow-boy crachant sa rage en cuvant son alcool fort aux portes d'un saloon.

- shérif springsteen et sa diligence -

Parmi les autres trésors escortés par cette diligence Springsteen lancée à bride abattue, d'autres titres qui explorent la palette de son immense talent. Exemple, 'Tomorrow Never Knows', rythme country et slide guitar, petite ballade efficace qui annonce une ambiance plus feutrée. En effet, pour les deux derniers titres, Bruce fait patte de velours. Avec 'Last Carnival' d'abord, qui rend Hommage à Dan Federici, fidèle parmi les fidèles, présent à ses côtés dès 1969 (avant même le E-Street Band, créé en 1972). Ce membre historique d'un groupe désormais inscrit au patrimoine rock de l'humanité a tiré sa révérence en 2008. Séquence émotion.

Et puis, puisqu'il faut bien refermer ce nouveau chapitre héroîque dune carrière bien remplie, Springsteen glisse 'The Wrestler', comme un rappel, seul en scène avec sa guitare, lui devant et nous derrière. Composée à la demande de Mickey Rourke pour le générique de fin du film du même nom, cette mélodie triste pour catcheur en bout de course résonnera encore bien longtemps dans la pièce une fois que les baffles se seront tues. Alors telle une âme perdue dans un troquet de Casablanca vous vous entendrez murmurer "Play it again Bruce"09/03/2009