- la découverte de la culture arabo-islamique -

La riche exposition que nous propose depuis la mi-octobre l'Institut du Monde Arabe met parfaitement en contraste l’arrivée des Français conquérant et les populations musulmanes (sous domination Ottomane) de l'époque. Elle nous fait découvrir les rouages culturels de l’Egypte du XIXè siècle. Ainsi on y apprend que le gouverneur est nommé par Istanbul (Pacha) et que l’administration des provinces est confiée à des « émirs ».

La région est instable sur le plan politique. Les milices protectrices des pachas sont parfois attaquées par les mamelouks, déstabilisant ainsi les ordres émis par le pouvoir central Ottoman (la Porte). Bonaparte va jouer de ces divisions pour intégrer habilement les nouveaux hommes forts de la région dans la gestion des villes conquises. Une forme d’émancipation en marche va révolutionner l’équilibre même de cette région d’Orient. Les populations opprimés et dominés par les mamelouks (ou les Français) seront poussées par le pouvoir Ottoman d’Istanbul à se rebeller. L’exposition démontre que l’arrivée des Français est un déclencheur de cette émancipation salutaire.

- l’amorce d’une frénésie : Egyptologie
ou Egyptomania ? -

A l’occasion de cette rétrospective, il nous est offert de découvrir une autre facette de la campagne orientale de Napoléon Bonaparte : la formidable passion de la France et des Français pour les vestiges de l’ancienne Egypte. Le terme même d’Egyptologie nait à cette époque. C’est la première fois qu’une puissance extérieure au monde musulman s’investit dans une telle entreprise de fouilles archéologiques. Durant des mois, les savants emmenés par Bonaparte vont sillonner les contrées jouxtant le Nil, pour y desceller les trésors enfouis et mettre à jour les merveilles que nous connaissons aujourd’hui. De ces découvertes jailliront de nombreux textes et manuels dont le célèbre ouvrage "pharaonique" intitulé Description De l’Egypte, qui aujourd’hui encore, constitue un référant en la matière. Tous les volumes de l'édition originale, au gigantesque format, sont d'ailleurs réunis dans l'une des salles de l'exposition et présentés dans un meuble magnifique, inspirée de l'art de l'Egypte ancienne, spécialement conçu pour les (très riches) acquéreurs de l'époque.

L’exposition décrit également les échanges respectifs entre les ingénieurs français, soucieux de percer les secrets antiques, mais aussi de montrer au plus grand nombre les richesses de la culture arabo-islamique des populations musulmane d’alors. Un doux parfum d’orient flotte bientôt sur toute l’Europe et la passion gagne tous les cercles artistiques des grandes capitales. Bonaparte, lui-même, s’inspirera de cette mode Egyptienne en favorisant «l’orientalisme d’état», dans ce qui deviendra plus tard l’art impérial. De nombreuses allégories antiques vont alors s’afficher dans toutes les expressions artistiques du Premier Empire. Ainsi nous retrouverons l’art Egyptien dans toutes les marques d’affirmation du pouvoir de l’Empereur (monuments, musées, œuvres théâtrales et romanesque, mode vestimentaire). L’exposition est riche en bibelots et œuvres d’art témoins de cette frénésie.

- ambiance orientale garantie -

Quand vient l'heure du bilan, la Campagne d’Egypte de Bonaparte ne brille pas par ses succès militaires. Les troupes Française vont rester dans le pays des pyramides (d'où quarante siècles les contemplent) jusqu’en août 1801 et seront contraintes de capituler devant les offensives répétées des Anglais, alliés aux troupes ottomanes. Les Français auront donc profondément marqué la région des pyramides par leur extraordinaire aptitude à mettre en lumière les richesses de la culture Egyptienne. Loin d’atteindre les objectifs escomptés par le Directoire, les grands travaux entrepris par les ingénieurs de Bonaparte porteront leurs fruits bien des années lus tard. L'une des conséquences les plus connues des fruits de cette expédition sera bien entendu le déchiffrage historique, en 1822, des hiéroglyphes égyptiens de la Pierre de Rosette par Champollion. On pourrait également citer le percement du Canal de Suez (inauguré en 1869) par Ferdinand de Lesseps - encore un français - reliant la Mer Méditerranée à la Mer Rouge .

Fort de ces belles œuvres rassemblées en un seul endroit, l’exposition Bonaparte Et L’Egypte offrira aux profanes comme aux érudits des campagnes de Napoléon la contemplation de bon nombre de trésors d’époque. Nous vous souhaitons un bon voyage au parfum d’orient en compagnie de l’héritage de ces héros d’un autre siècle.20/11/2008