- son Panthéon à lui -

Lorsqu’on se repasse le film de sa vie, on comprend que l’odeur de soufre qui accompagne Vergès, lui ait évité les honneurs d’une République prude aux faux airs de sainte-nitouche, qui s’effarouche facilement et durablement lorsqu’on la prend à rebrousse-poil. Son entrée au Panthéon à lui s’est faite de son vivant, sur pellicule, par le biais d’un réalisateur très renseigné. En 2007, avec son film L’Avocat De La Terreur, Barbet Shroeder a définitivement installé Vergès comme l’un des personnages les plus étonnants de notre époque.

Mais ceci n’est pas le dernier chapitre. Agé de 83 ans, Jacques Vergès n’est toujours pas rangé des voitures. Son actualité judiciaire reste chargée et bien entendu propice à la polémique. En décembre 2008, par exemple, il est au Cambodge en tant que défenseur de Khieu Samphan, un ancien dirigeant des Khmers Rouges dont le TPI (Tribunal Pénal International) prépare le procès. Fidèle à lui-même, il récolte un avertissement du tribunal pour son emportement lorsqu’il fait valoir qu’il ne peut assurer la défense de son client, étant donné que les documents d’accusation sont constitués de 16 000 pages en anglais et de 60 000 en khmer (or, la deuxième langue officielle est le français). Arguant qu’il ne pourrait assurer la défense de son client dans ces conditions, il a réussi à faire ajourner le procès…

- document INA-
Vergès reprend en main la défense du jardinier marocain Omar Raddad

- le monde est un théâtre -

Il aime à le rappeler, Vergès est avant tout mu par la passion de défendre, celle de transmettre aussi (il écume inlassablement les amphis et autres conférences, rencontres ou débats) et ne quittera probablement le prétoire que pour le dernier acte. Car lui qui se réfère souvent à Richard III de Shakespeare le sait, puisqu’il a vécu et façonné sa vie comme celle d’un personnage né sous une plume talentueuse : tout n’est que théâtre. La preuve, le pétillant octogénaire, qui se refuse à jouer les vieux sages, s’offre une nouvelle jeunesse en faisant ses premiers pas d’acteur sur une scène. Depuis le 21 septembre 2008, il se produit sur les planches du Théâtre de la Madeleine avec Serial Plaideur. C'est le titre, fort judicieux, d'un monologue qu’il a écrit et qui, à défaut de dévoiler ses mystères personnels, éclaire l’œil du quidam rendu myope par l’info fast-food, le prêt-à-penser mâché par la télé, lui proposant une autre vision – sans doute plus dérangeante - de l’humain face au monde. Un peu ce que fait Jacques Vergès depuis plus de 50 ans21/01/2009