En ces temps où on reparle tant de Brel (voir notre article) et de Coluche (sur les écrans des mercredi) la Cité de la Musique, à la Villette, propose de redécouvrir une autre immense figure du paysage artistique hexagonal : Serge Gainsbourg, alias Gainsbarre. Au delà du chanteur aimé du plus grand nombre, l'occasion de se pencher sur le parcours d'un artiste complet : peintre, écrivain, réalisateur, acteur… Et pour cela, Frédéric Sanchez, le commissaire de l’exposition, a fait la part belle aux images. Voici un avant-goût de ce qui s'annonce comme l'événement culturel de la saison.

- TV, sex and fun -

Serge Gainsbourg n'avait certes pas le physique d'un Gérard Philippe mais nul ne peut contester qu'il fut un homme à femmes : Brigitte Bardot, puis Jane Birkin furent ses muses les plus emblématiques. Sans oublier Bambou, la maman du petit Lulu. Voilà pour les principales, la liste complète donnerait probablement matière à constituer un annuaire!

En relation directe avec cette facette importante du personnage, la troisième partie de l’exposition, « la Décadanse ,» embraye sur le scandale international de « Je t’aime moi non plus ». En 1968, Serge Gainsbourg chante le titre aux côtés de Brigitte Bardot, pour laquelle il l'a composé, en gage d'un amour passionnel. Mais à peine la maquette est-elle enregistrée que la chanson provoque déjà un tollé général. Bardot, mariée et infidèle, hésite. Elle demande à Gainsbourg de ne pas sortir la chanson. Un souhait qu'il respecte… à moitié. Quelques années plus tard, c’est à Jane Birkin de poser sa voix sur ce titre sulfureux. Le succès sera fulgurant et international, le couple Gainsbourg/Birkin devenant derechef l'un des plus médiatiques de son époque.

Le parcours de l’exposition se poursuit d'ailleurs sur la génèse de ce couple emblématique avec des extraits de Slogan, film qui permet, en 1968, la rencontre de deux acteurs de second ordre : Gainsbourg et Birkin. Un extrait du documentaire-fiction Jane B. par Agnès V., réalisé par Agnès Varda présente aux visiteurs, diapositives à l’appui, la métamorphose de la petite anglaise maladroite au mauvais français en muse sensuelle, qui inspirera cinq albums à Serge Gainsbourg, dont le mythique chef-d'œuvre pop Melody Nelson.

L’exposition consacre une large section à cet opus, en diffusant l’adaptation télévisuelle de Jean-Christophe Averty dans son intégralité ! C’est d’ailleurs à partir de cet album que Serge Gainsbourg définit une « éthique de la personnalité ». Il fait désormais figure de dandy, animé par la mise en scène de soi et la transgression des valeurs établies.

- la provocation comme mode de création -

Artiste permanent, dela vie publique à la vie privée, les états d'âmes de la personnalité complexe et torturée de Gainsbourg deviennent peu à peu absolument indissociables de son processus créatif. La dernière partie de l’exposition, « Ecce Homo », revient sur les années 80, qui s’ouvrent sur un nouveau d’éclat d’envergure, politique cette fois-ci. C’est en effet à cette époque que le chanteur, séparé de Birkin, opte pour la provocation pure comme mode de création. Il propose alors sa propre version de la Marseillaise… version reggae.

Toute une partie de l’espace est justement consacrée à la réunion de différents talents, à la culture rastafari que Gainsbourg contribue à faire connaître en France et au scandale qu’elle provoque. A découvrir notamment, des photos inédites et des images du concert mythique au Palace, qui amorça son retour triomphal après de nombreuses années de totale abscence scénique. Deux documents audiovisuels évoquent également les faits marquants qui ont suivi la diffusion sur les ondes d’Aux Armes Etc : les paras à Strasbourg en 1980 et l’achat aux enchères, en 1981, du manuscrit original de Rouget de Lisle par Gainsbourg. Pourtant, Frédéric Sanchez tient à souligner une petite nuance : « Serge Gainsbourg n’a pas eu de vie de rebelle, à moins d’être obsédé par le côté alcoolique. Nous allons d’ailleurs essayer d’évoquer de manière élégante cette partie de son personnage. »

Gainsbourg était un mythe, une icône… mais avant tout un homme, avec ses sensibilités. Les objets personnels prêtés par Charlotte Gainsbourg, sa fille, en témoignent : la fameuse statue de « L’Homme à la tête de chou », les différents manuscrits autographes, les marionnettes à l’effigie du chanteur, le portrait de Bambou, sont autant d’objets qui peuplaient l’hôtel de la rue Verneuil (le domicile de Gainsbourg qui pourrait devenir son Musée). Ils sont hétéroclites mais tous convergent vers un même attrait : l’art