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Entretien Filmé

- ÉRIC-EMMANUEL schmitt -

Concerto À La Mémoire D'Un Ange - Albin Michel

 

- Interview, cadre, : Gert-Peter BRUCH - Montage : Julie COUTURIER -

 

3/3: 'OSCAR, MILADY, TINTIN... ET LUI !'

- par Gert-Peter BRUCH -

Dans cette troisième et dernière vidéo, nous sortons du contexte de Concerto À La Mémoire D'Un Ange pour nous intéresser aux autres actualités d'un homme d'écriture polyvalent. L'occasion d'un retour sur son second film en tant que réalisateur, l'émouvant Oscar Et La Dame Rose (adapté de son roman éponyme, troisième partie du "Cycle de l'invisible", paru en 2002 ). Le film est sorti en 2009 et narre l'histoire d'un enfant atteint de leucémie. Eric-Emmanuel Schmitt nous parle ensuite théâtre, évoquant ses adaptations du Bossu et, tout récemment, des Trois Mousquetaires avec une pièce intitulée Milady (Natacha Amal en tient le rôle titre), dont les représentations se tiendront du 14 juillet au 7 août 2010 à l'Abbaye de Villers-la-Ville (Belgique). Une conversation très ouverte, où nous parlerons aussi de Tintin et de ligne claire...

 

INTERVIEW

>> TEXTE INTÉGRAL <<

***

3 - « TOUT EST AFFAIRE DE DÉCOR.
CHANGER DE LIT, CHANGER DE CORPS. »

Il y a un élément de grande importance dans le livre dont nous n'avons pas encore parlé, c'est Sainte Rita.

Oui. J'ai pris un gros risque dans ce livre en incluant un fil rouge, une femme, qui apparaît sous la forme d'une carte religieuse, d'objets fabriqués à Hong Kong, du nom d'une clinique. Cette femme, qui se manifeste de manière chaque fois différente, c'est Rita, en l'occurrence Sainte Rita. La première fois que l'on m'a parlé de Sainte Rita, la patronne des causes désespérées, j'ai éclaté de rire et j'ai dit : « bah ! C'est trop tard. Il n'y a plus besoin de demander une intercession. » Par la suite, je me suis rendu compte que j'avais été un peu sot d'avoir ri car les gens qui s'adressent à Sainte Rita sont déjà dans le malheur, la détresse et se sentent tellement bas dans l'échelle sociale et humaine qu'ils n'osent pas prier Dieu directement. Ils ont besoin de cette figure intermédiaire pour les comprendre et porter leur plainte, leur demande à Dieu. Bien que cela n'ait pas beaucoup de sens pour moi, cela me touche humainement, profondément. Cela ne correspond pas à ma spiritualité mais j'aime comprendre celle des autres.

Dans cette histoire, Sainte Rita "apparaît" sous la forme d'objets, ou de références et à chaque fois, elle est un révélateur. Elle permet de voir où en sont les personnages dans leur trajet spirituel. Elle va faire rire certains, par exemple lorsqu'elle fait l'objet d'un commerce pour Axel, quand il est devenu un monstre. Il produit à la fois des objets religieux et pornographiques, mais comme il dit « une fois qu'on est équipé pour les moulages, autant continuer » !

Pour moi, l'intérêt de cette Sainte Rita réside dans la figure historique réelle qui existe derrière. C'était une italienne du XIVème siècle, il me semble, l'une des grandes figures du pardon de l'humanité car elle est parvenue à réconcilier deux familles qui ne devaient pas s'entendre : la famille de son mari assassiné et celle des assassins de son mari. Comment peut-on pardonner ? Comment peut-on ensuite rendre le pardon contagieux auprès d'êtres blessés ? C'est une chose que je trouvais extraordinaire. Comme le pardon est l'un des thèmes du livre, je trouvais important qu'elle soit présente.

Existe-t-il encore beaucoup de gens qui croient en Sainte Rita ?

Oui beaucoup.

Vous avez dû en rencontrer depuis, forcément ?

Oui, parce que, de manière très spontanée, les gens m'avouent avoir Rita pour sainte. Et puis on sait qu'il existe une chapelle de Sainte Rita à Paris, plus précisément à Pigalle, où vont les ouvriers et ouvrières du sexe qui se sentent dans une misère et une détresse telles qu'ils n'osent pas prier Dieu directement. Différents lieux d'Europe, la Belgique, le sud de la France, l'Italie, accueillent des chapelles de Sainte Rita. C'est une figure de la détresse humaine, du malheur qui voudrait dépasser le malheur. Il y a quelque chose de positiif dans cette image de patronne des causes désespérées, de sainte de l'impossible. C'est un appel de l'homme à se surpasser, à ne pas en rester à la violence, qu'elle soit subie ou exercée, et à atteindre un autre état dans lequel il est possible de vivre. En dehors du folklore qui l'entoure, voilà l'idée importante.

Il existe deux scènes dans vos nouvelles dans lesquelles les personnages s'observent dans un miroir. Vous aimez ces scènes là ? Pourquoi sont-elles dans le livre ?

J'ai toujours eu moi même un rapport très étrange avec les glaces, parce que je ne m'y suis jamais reconnu. Je sais que c'est moi parce que le reflet bouge en même temps que ce que je fais, donc....

Que vous voulez dire par ne pas vous reconnaître ?

C'est à dire que je n'ai pas l'impression que mon corps raconte exactement ce que je suis. Peut être ai-je tort d'ailleurs, mais en tout cas c'est mon sentiment.

Encore aujourd'hui ?

Oui, complètement. Parce que j'ai l'impression que mon corps raconte une autre histoire que moi. C'est peut être pour ça que je suis devenu écrivain : pour prendre d'autres corps et raconter toutes les histoires que j'ai dans la tête... alors que mon corps à moi ne raconte que quelques petites histoire. Je trouve que l'âme est infinie. Le corps, lui, est fini. Mon imagination est multiple, plurielle elle embrasse de nombreuses situations et personnages alors que mon corps n'est que celui d'un seul personnage. Je trouve que le corps est petit, même lorsque l'on mesure 1m90. L'âme, au contraire, est grande (rire). Il existe pour moi une disproportion entre les deux et j'essaie d'inclure des moments d'introspection de mes personnages dans mes livres. C'était le cas pour Hitler.

Je suis en train d'écrire un roman dans lequel le thème du miroir est extrêmement important. Le moment du miroir est celui de l'introspection, l'instant où l'on songe à sa vérité profonde. Il y a ce que raconte le corps, qui est UNE vérité. Et pui, il y a peut-être derrière ce qui nourrit cette histoire et que ne dit pas le corps. Quand on change d'état d'esprit, par exemple, le corps lui ne se transforme pas, il reste le même. C'est pourquoi il n'est pas une vérité pour moi. Le moment du miroir c'est le moment ou l'on débusque ce qui ne va pas en soi. Pas dans le sens « je vais aller chez le chirurgien esthétique » (rire), mais plutôt dans celui qui fait dire « je ne construis pas ma vie de la bonne façon ». Ce sont donc vraiment des moments-clés, oui.

Il peut exister des décalages. Certaines personnes pensent que l'on réalise seulement au bout de deux ans que l'on a changé. D'autres ont beaucoup de mal à faire en sorte que leur corps soit en phase avec leur esprit.

Le corps exprime quand même des choses essentielles des êtres : leur lumière ou leur absence de lumière, leur épanouissement, leur non épanouissement, leur énergie ou le fait qu'ils n'en aient pas. Et je pense que ce n'est qu'à la fin de sa vie qu'on se ressemble.

Si on a la chance d'être vieux !

Si on a la chance d'être vieux et si on a la chance d'avoir pu s'épanouir dans son existence, on peut finir par se ressembler. Je pense qu'à vingt ans on ne se ressemble pas mais. On ressemble à ce qu'ont fabriqué les parents et à son corps, mais à cet âge là, on n'est pas encore l'auteur de soi-même. C'est d'ailleurs l'un des autres thèmes du livres. Quand devient-on un peu l'auteur de soi-même ? Moi je pense que c'est l'homme de quarante ou cinquante ans qui est le fils du jeune homme de vingt ans qu'il a été.

Cele me fait penser à un proverbe asiatique qui dit : « à vingt ans on a la tête qu'on a et à quarante on a celle qu'on mérite. »

Je ne le connaissais pas mais c'est tout à fait juste. J'ai vécu ce proverbe lorsque j'ai rencontré ma marraine au théâtre, celle qui m'a ouvert toutes les portes : Edwige Feuillère. Eh bien Edwige, à vingt ans elle était belle, hiératique et à quatre-vingt ans, elle était mignonne. C'était ça la vérité.

C'est une très jolie formule... Un petit mot sur votre film Oscar Et La Dame Rose, qui a eu un très bon accueil et que l'on a beaucoup aimé à CulturClub.

Merci ! J'ai adoré faire ce film. J'étais très angoissé de le porter devant le public et je continue maintenant à l'accompagner dans certains pays. Pendant toute la préparation, tout le tournage, j'étais à fleur de peau et je pense avoir vraiment vécu le genre d'émotions que, peut-être, le spectateur ressent quand il voit le film. La raison en est qu'il s'agit d'un film racontant l'amour de la vie à travers une situation tragique. Il y aura dans ma vie un avant et un après. En fait, c'est en le faisant que je suis vraiment tombé amoureux du cinéma...

Vous allez donc réitérer l'expérience, rassurez-nous ?

Oui, je vais bientôt continuer mais en précisant bien que mon sol, mon axe, c'est l'écriture. Là, je vais écrire pour l'écran, mais je suis un écrivain, pas un metteur en scène.

Lors de la promotion d'Oscar Et La Dame Rose, vos acteurs étaient très émus. Le tournage a dû être incroyable, en tout cas c'est ce que disait Michèle Laroque par exemple.

Ah oui, ce film était une expérience humaine parce qu'on racontait l'histoire tellement importante d'un enfant malade, de l'amour qui ne passe plus entre ses parents et lui, des adultes qui lui cachent la vérité, de cette rencontre d'amitié et d'amour entre cet enfant et la femme jouée par Michèle Laroque... Il se passait des choses tellement importantes que personne ne les truquait, ni ne roulait des mécaniques. Nous étions tous en face du petit garçon que nous sommes. Nous étions tout nus, comme on l'est tous devant la maladie et devant la mort. Les rapports humains étaient si forts que les acteurs sont tous restés au delà du tournage. C'est une famille que nous avons créé ce jour là.

Vous avez également un projet adapté des Trois Mousquetaires intitulé Milady, avec Natacha Amal, n'est-ce pas ?

Ah, vous savez tout vous ! Oui, effectivement. Il existe un festival en Belgique qui fait courir les belges car il se déroule dans un lieu magnifique : les ruines de l'abbaye cistercienne de Villers-La-Ville. Le soir dans ces ruines -il faut vraiment être belge pour faire ça- on joue en plein air une pièce qui a souvent énormément de succès. Il y a deux ans, j'avais adapté pour eux Le Bossu, car il faut une pièce fédératrice, qui attire la majorité des gens, que l'on peut venir voir en famille. J'avais donc réalisé une version du Bossu qui avait "cassé la baraque".

Cette fois, j'ai écrit Milady. Il s'agit de l'histoire des Trois Mousquetaires, du point de vue de Milady, c'est à dire de la garce, de la méchante, de la salope. Mais on va découvrir que c'est plus complexe que cela. Bien sûr, c'est une garce et une salope, mais c'est aussi une victime, une femme qui essaie de trouver sa place dans une société pleine de préjugés qui la lui refuse. Le personnage passe au premier plan et devient véritablement très complexe car elle montre que le comportement des hommes à son égard est très étrange. Évidemment, c'est aussi l'histoire des Trois Mousquetaires.

Natacha Amal interpréterait donc le rôle de Milady.

Oui, je pense qu'elle est vraiment faite pour ce personnage de force et de feu.

Parvenez-vous finalement à vous reposer ? J'avais lu en effet que vous étiez à bout de nerfs au bout de trois jours de vacances.

(Rire) oui, je le suis toujours. J'ai réussi à tenir une semaine la dernière fois. J'étais épuisé par mon effort de repos et heureusement je me suis remis à écrire. On n'est pas sûrs que la vie sera longue alors je suis gourmand, je vis dans le désir. J'ai une vie à moi en dehors de l'écriture, toute aussi passionnante, mais j'ai la chance de pouvoir m'exprimer, d'être aussi désiré et attendu par les lecteurs, par le théâtre. Je ne veux donc pas passer à côté de ma vie.

Nous approchons de la fin, alors je voudrais terminer par une jolie phrase de votre crû: « on devient un auteur de best-seller mais on n'est jamais l'auteur de son succès. »

Moi, je suis l'auteur de mes livres, mais pas celui de mes succès. C'est le public qui parfois détermine quel livre il faut lire et décide d'en parler ou de l'offrir. Je pense que le succès est toujours un accident... un heureux accident. Lorsque l'on écrit, on ne vise pas le succès, on cherche à être juste, précis et intense. Le succès n'est pas un dû, il est toujours une bonne surprise.

 

- PRÉSENTATION DE L'ÉDITEUR -

 

Quel rapport entre une femme qui empoisonne ses maris successifs et un président de la République amoureux ? Quel lien entre un simple marin honnête et un escroc international vendant des bondieuseries usinées en Chine ? Par quel miracle, une image de sainte Rita, patronne des causes désespérées, devient-elle le guide mystérieux de leurs existences ?

Tous ces héros ont eu la possibilité de se racheter, de préférer la lumière à l'ombre. A chacun, un jour, la rédemption a été offerte. Certains l'ont reçue, d'autres l'ont refusée, quelques uns ne se sont aperçus de rien. Quatre histoires liées entre elles. Quatre histoires qui traversent l'ordinaire et l'extraordinaire de toute vie. Quatre histoires qui creusent cette question : sommes-nous libres ou subissons-nous un destin ? Pouvons-nous changer ?26/04/2010

Éric-Emmanuel SCHMITT - CONCERTO À LA MÉMOIRE D'UN ANGE
Albin Michel
En librairie depuis le 3 mars 2010 / 229 pages, 18 €

 

>> INFOS SUR L'OUVRAGE

DÉCOUVREZ UN AUTRE ENTRETIEN FILMÉ
DE ÉRIC-EMMANUEL SCHMITTICI

Éric-Emmanuel SCHMITT
concertiste des causes perdues

 

 

-après un passage par la case cinéma, l'écrivain nous revient très en forme avec Concerto À La Mémoire D'Un Ange, dont il nous dévoile les secrets

Nous retrouvons donc Éric-Emmanuel Schmitt un an après notre précédent entretien, autour, cette fois-ci, d'un savoureux livre de nouvelles (il n'aime pas le mot recueil): Concerto À La Mémoire D'Un Ange. L'occasion également d'évoquer ses récentes ou prochaines incursions dans les domaines du cinéma et du théâtre. Car l'auteur à (grand) succès est devenu un inconditionnel du septième art depuis les succès à l'écran de deux de ses romans, adaptés et mis en scène par ses soins : Odette Toulemonde (2007) et plus récemment le bouleversant Oscar Et La Dame Rose (2009), avec Michèle Laroque dans le rôle principal. Sur les planches, il met en scène Natacha Amal dans une interprétation unique de la terrible Milady de Winter, méchante attitrée du roman de Dumas, Les Trois Mousquetaires. Avec Milady, Éric-Emmanuel Schmitt va prendre à contre-courant les spectacles de cape et d'épée dans une œuvre plus féminine, centrée sur un personnage cruel mais inscrit dans une société qui l'est tout autant. Les représentations sont prévues du 14 juillet au 7 août 2010 à l'Abbaye de Villers-la-Ville (Belgique). En attendant, CulturClub vous convie à une exploration passionnante, avec l'auteur pour guide, d'un livre qui vient tout juste de recevoir le prix Goncourt de la nouvelle.

06/05/2010 >> accueil
        

 

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