- par Quentin MERCIER - - Un fauteuil pour deux -Si l’on a cru en 2007 que Ségolène Royal parvenait à fédérer les troupes autour de son programme, on s’est vite aperçu qu’il s’agissait en fait d’un « non » à l’élection du futur Président, plutôt qu’un « oui » à son programme, en ce qui concerne, en tout cas, les hautes instances socialistes. Dès les résultats des suffrages de la présidentielle, elle se voyait abandonnée par ces mêmes instances. Mais forte de la ferveur des militants, elle est parvenue à rester malgré tout sur le devant de la scène. De son côté, Martine Aubry, "éléphante" du PS, s’était effacée quelque peu de la scène nationale, après avoir été la Ministre de l’Emploi et de la Solidarité (et des 35 heures) sous Lionel Jospin. Restée Maire de Lille et l’un des cadres incontestés du parti, elle a attendu patiemment son heure pour tenter de tirer son épingle du jeu. Elle a d’ailleurs retardé jusqu’à la dernière minute l’annonce de sa candidature au poste de premier secrétaire. - à y perdre son latin -Après le vote des motions le 6 novembre, qui voyait arriver, à la surprise quasi-générale, Ségolène Royal en première place d’une courte tête devant Bertrand Delanoë, Martine Aubry et Benoît Hamon, il planait la même confusion que depuis le milieu des années 1990. Aucun des programmes ne se voyait accorder de plébiscite de la part des votants. L'élection du premier dirigeant du parti et sa s’annonçait donc compliquée et sa future marge de maneuvre très réduite. Personne ne se doutait alors que les choses s’envenimeraient à tel point que l’existence même du PS en serait menacée. En effet, après le vote du 6, ce 20 novembre allait ressembler à une journée noire pour les tenants de la gauche française, qui participaient au deuxième tour de l’élection de leur chef de file. Après que les 232.912 militants appelés aux urnes se soient prononcés, il apparaissait que Martine Aubry l’emportait avec une avance ridicule de 42 voix d’avance sur 134.784 bulletins enregistrés. Résultat que contestaient immédiatement les partisans de Ségolène Royal, demandant aussitôt l’instauration d’un troisième tour, « pour fraude ». Il sera refusé, et un récolement* sera organisé. - résolution sans solution… -Après ce récolement, c’est Martine Aubry qui est désignée vainqueur avec finalement 102 voix d’écart à son avantage. Dès l’annonce du scrutin définitif, Ségolène Royal annonce alors, par le biais de son site internet, qu'elle se projette déjà vers sa candidature aux futures présidentielles de 2012. De quoi rajouter à la confusion de socialistes déjà désorientés. Cependant, les choses semblent s'apaiser quelque peu et le mercredi 26 a eu lieu la première rencontre entre la désormais première secrétaire Martine Aubry, et sa rivale déchue, Ségolène Royale, qui s’est « très bien déroulée » selon les intéressées. Martine Aubry veut « rassurer », et ce ne sera pas la moindre de ses tâches. D’autant que, malgré son élection, Ségolène Royal et sa garde rapprochée ont assuré, par la voix d’Emmanuel Valls, vouloir « faire pleinement partie de la direction ». On imagine déjà l’entente cordiale qui règnera au sein du groupe socialiste, après que cette même équipe ait voulu intenter un procès à leurs propres troupes au lendemain du scrutin du deuxième tour… - Retour au calme ? -Se voulant apaisante et fédératrice, Martine Aubry, dans son premier discours à la tête du PS, a fait cette introduction : « j’ai d’abord un seul mot à vous dire : merci. Le second va immédiatement à Ségolène pour lui dire : on va, ensemble, gagner pour les Français, j’en suis convaincue. » Il s’agit maintenant de savoir comment la tête du parti va s’organiser pour adopter une ligne de conduite claire et définir un programme qui soit à même de rallier l’ensemble des troupes. Le compromis est donc déjà de mise. Devant ces dissensions, et l’absence évidente de consensus à l’heure actuelle, on peut sérieusement douter de la capacité du PS à tenir son rang et faire contrepoids à la majorité installée. Pour la gauche, l’ironie est amère : devant un système capitaliste, réputé « de droite », qui tombe en faillite, elle s’avère incapable de saisir l’occasion qui lui est donnée de s’exprimer et de proposer de solutions alternatives 28/11/2008 * Récolement : Le "récolement" est un contrôle opéré par un huissier ou par un greffier fait après inventaire, après saisie ou après apposition de scellés afin de vérifier que les biens mis sous main de justice n'ont pas été déplacés ou détournés. Source
- la gagnante et la perdante -
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