L'actualité de la bande-dessinée

 

Les chroniques

 

La BD made in America

 

L'interview qui déshabille la BD

 

Les coulisses de la BD

 

Trésors de la BD de collection

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
























































































































































































 

 
























































































 

 

 

 

VOIR AUSSI L'INTERVIEW DE P. XAVIER
ET NOTRE CRITIQUE DE CROISADE T4

  Croisade T4 - Becs De Feu
JEAN DUFAUX,
d'une Croisade à l'autre

 

 

-il vient à peine de terminer une impressionnante saga qu'il en imagine déjà une autre, rencontre avec un scénariste en pleine ébullition

Scénariste prolifique et apprécié du public, Jean Dufaux est un passionné de littérature et de cinéma. Fortes de son expérience à l'Institut des Arts et Diffusion de Bruxelles, ses histoires de bande dessinée sont de véritables fresques hollywoodiennes. C'est le cas de Croisade, commencée il y a quatre ans et qui trouve aujourd'hui sa conclusion. Avec le dessinateur Philippe Xavier, fidèle compagnon de route, Jean Dufaux a créé une saga aux allures de mythe historique. En BD comme au ciné, la fin n'est qu'un commencement, alos que les fans se rassurent : notre duo magique est déjà affairé à une suite des aventures de Gauthier de Flandres, personnage phare de Croisade. En attendant le premier opus, de cette nouvelle saga, CulturClub vous propose une exploration de l'œuvre avec son créateur érudit pour guide.

12/12/2009 >> accueil
         - propos recueillis par Gert-Peter BRUCH -

 

 

 

*

Rencontre

- JEAN DUFAUX -

Croisade, T4, Les Becs De Feu - Le Lombard

 

Vidéo 1/2:
'L'ÉTERNEL RECOMMENCEMENT'

 

- Cadre : Gert-Peter BRUCH et James AMON - Montage : Gert-Peter BRUCH -

Jean Dufaux, scénariste émérite de Murena, entre autres série à succès, évoque ce qui fait l'essence de sa saga Croisade, qui s'achève avec un quatrième tome... pour mieux renaître de ses cendres.

 

1/2 - CROISADES, L'ÉTERNEL RETOUR -


La conclusion d'une saga est un moment-clé. Je vous laisse nous en parler.

Diisons que j'ai effectivement conçu Croisade en quatre tomes et développements il y a quatre ans. Quelque part le temps est long, puisqu'en bande dessinée, malheureusement, on ne peut pas livrer toute l'œuvre d'un seul tenant mais par épisode. il faut être patient. Il y a toute une structure, tout un plan et on est toujours content de voir que le dessin, le scénario, le découpage, le montage s'inscrivent dans ce plan initial.

C'est donc un soulagement de voir que ça a fonctionné et que les quatre volumes de Croisade apparaissent surtout comme un socle suffisamment puissant pour que je puisse développer un peu mon imaginaire.

De fait, l'aventure continue...

Les quatre volumes de Croisade sont un réservoir dans lequel on peut puiser. Pour la suite, on s'attache maintenant à des destins particuliers : Gauthier de Flandre sera effectivement le premier personnage que nous allons suivre. C'est un peu comme si l'on picorait dans une version nouvelle des contes des Milles Et Une Nuits et forcément, il y a plein d'enchantements qu'il faut choisir.

On n'a jamais vu autant de romans sur les templiers et les croisades n'ont jamais été aussi à la mode. Qu'est ce qui explique selon vous cet engouement, qui dépasse le cadre de la bd ?

C'est amusant car on a eu le même problème avec Murena, finalement. On a lancé la saga alors que n'étaient pas encore sortis le film de Ridley Scott (NDLR : Gladiator), la série Rome etc... Il est vrai que maintenant il y a une arborescence de l'Antiquité et des croisades. Il ne faut surtout pas croire que nous avons lancé les croisades, elles sont parties tout de même de lectures du XIXème siècle, de Walter Scott, du Talisman, de vieux films en noir et blanc, Cécil B. DeMille, David Butler, Rex Harrison. Il y a déjà plein d'ouvrages qui nous ont précédé.

Il ne faut pas oublier que même des mythes comme Richard Cœur de Lion, Ivanhoé, Robin des bois sont rattachés quelque part aux croisades. En fait, la culture est un serpent, une sinusoïdale : on l'oublie mais elle revient. Je crois que l'on se rend bien compte que le frottement, les guerres, parfois le non-respect de la religion ou de la culture de l'autre, amènent toujours des croisades.

Lorsque nous avons écrit la saga, le but premier était de se dire que c'était une croisade qui voyageait dans le temps, qu'elle s'inscrivait dans l'Histoire et dans notre présent. Je pars du principe que les croisades ne sont pas finies, elles vivent toujours. Les alibis sont les mêmes, car il en faut pour lancer une guerre et je pense que la fin de ce prologue montre bien que toute une partie de la population n'est intéressée que par le profit, par l'exploitation des terres ou l'exploitation d'une culture. Je crois que cela est très important.

Vous dîtes que les croisades sont tout à fait d'actualité, d'autant plus après ce qui a découlé du 11 septembre et qui a fait basculer l'intérêt des gens vers ce thème.

Absolument. Je crois que le 11 septembre était l'alibi que les croisades ont observé de leur temps. Il y a vraiment quelque chose qui m'agace et me heurte beaucoup dans la vie et j'essaie d'y réagir par ce que j'écris. Il s'agit de ce non-respect que j'ai déjà évoqué. Celui-ci ouvre la porte au diable, sous toutes ses formes.

Si tout simplement on pouvait se dire que toute différence, toute religion et cuisine différente, enrichit plutôt qu'elle ne supprime, ce serait extraordinaire. J'ai été élevé dans cette conception et j'éduque ma fille dans une idée très simple, à savoir de s'enrichir des cultures différentes. Dès qu'une armée s'inscrit dans un pays aux noms d'alibis politiques et économiques, on retombe dans le principe de la croisade.

J'ai l'impression, comme vous le disiez tout à l'heure, que c'est une affaire de cycles. J'ai beaucoup apprécié dans cette bande dessinée cette manière de ne pas prendre uniquement en compte le point de vue des croisés chrétiens, mais les deux. Chacun peut se faire sa propre idée, vous n'imposez pas un avis, vous laissez le lecteur seul juge de ce qui se déroule sous ses yeux. Il n'y a pas de parti pris. Était-ce vraiment primordial pour vous ?

En vieillissant, une chose devient essentielle : il ne faut pas juger. Le lecteur lui même ne doit pas être juge. Il y a trois forces dans Croisade : les Sarrasins, les chrétiens et il y a ce que j'appelle la forme armée, militaire, le maître des machines. Si les Sarrasins conservent Jérusalem et si les chrétiens peuvent accéder au Saint Sépulcre, le maître des machines s'en moque complètement. Son nom n'a pas été choisi par hasard, il correspond à la force militaire. Ce qui l'intéresse est qu'on lui concède certaines terres... sur lesquelles existait déjà à l'époque cette huile mystérieuse : le pétrole. Nous avons bien trois présences, trois forces. Chacune suivant sa logique et sa thématique.

Pourquoi le Saint Sépulcre de la bande dessinée ressemble-t-il à la Kaaba de la Mecque ?

C'est une très bonne observation. Une fois de plus j'ai voulu superposer les religions et je n'ai pas voulu rentrer dans une image codifiée. C'est pour ça aussi que c'est l'image d'une femme et non d'un homme. Il y a un jeu, si vous voulez atteindre le spirituel, il faut accepter l'image que l'on vous donne.

Je suis chrétien par naissance, par éducation et aussi par motivation intérieure et je considère qu'en bon chrétien on doit lire Mahomet, l'Islam, et vice-versa parce qu'il ne faut pas oublier que le racisme existe des deux côtés. J'ai des amis juifs, arabes, des amis chrétiens et le seul ennemi finalement, est la bêtise. Elle est partout, elle est l'hydre monstrueuse, la face ouverte du diable. La bêtise humaine amène le racisme, le refus et le rejet. Si certains voient le Saint Sépulcre comme l'image du Christ, je leur dis non, car il est en fait l'image de la spiritualité et la spiritualité a beaucoup de visages.

On dépasse largement le cadre des croisades avec cette saga. Vous vous êtes notamment inspiré des Milles Et Une Nuits et de beaucoup d'autres choses.

Oui. Il ne faudrait pas que les lecteurs prennent tout ça trop au sérieux, l'important est de les faire rêver. Je répète souvent une formule car j'en suis content : « les croisades, c'est la pointe de l'histoire qui s'enfonce dans les tissus des Milles Et Une Nuits ». On parlait de culture, justement, celle des Milles Et Une Nuits a été pour moi un enchantement dans l'enfance et j'ai voulu retrouver cet émerveillement.

J'ai voulu inscrire l'Histoire dans les Milles Et Une Nuits car les frottements de l'un sur l'autre peuvent donner des choses intéressantes et originales. J'ai ainsi appris qu'il y avait des traditions orales sur des vampires dans l'armée chrétienne.

 

1 - Croisade T2 : Le Qua'dj, 2008

2 - Croisade T3 : Le Maître Des Machines, 2009

 

 

 

©CULTURCLUB.COM - Toute reproduction strictement interdite sans accord